Le mot « impressionnisme » naît sous la plume du critique Louis Leroy dans le Charivari, à propos du tableau de Monet, Impression, soleil levant, accroché du 15 avril au 15 mai 1874 dans l’exposition collective organisée à l’initiative du peintre Degas dans le studio du photographe Nadar, à Paris, 35 boulevard des Capucines.
Refusés aux Salons et traités de «barbouilleurs» dans les journaux qui défendent l’art officiel, les impressionnistes sont soutenus par les écrivains Emile Zola, Joris Karl Huysmans et Louis Edmond Duranty, par le critique Théodore Duret et par le marchand Paul Durand-Ruel qui, longtemps, reste leur seul appui financier.
De premiers amateurs se manifestent à partir de 1870 (les financiers Ernest Hoschedé, et Gustave Arosa, le comte Armand Doria, le baryton Jean-Baptiste Faure, le peintre Caillebotte, le docteur Paul Gachet, futur ami de Vincent Van Gogh) : ils deviennent beaucoup plus nombreux à partir de la fin du XIXe siècle.
Tableaux impressionnistes
On désigne par le mot «impressionnisme» le courant pictural qui s’est développé en France, progressivement entre le début des années 1860 et la fin du XIXe siècle — beaucoup plus tard si l’on considère l’œuvre de Monet, qui reste fidèle au style impressionniste jusqu’à sa mort en 1926.
Officiellement, la naissance du mouvement se situe en 1874 seulement, date de l’exposition chez Nadar, qui réunissait des œuvres de Cézanne, Degas, Monet, Morisot, Pissarro, Renoir, Sisley, et qui fut suivie de six autres expositions jusqu’en 1882, puis d’une huitième en 1886.
En fait, le groupe commence à exister, par des rencontres amicales à Paris autour de Claude Monet, à partir de 1862. Les années 1870 correspondent à l’apogée du mouvement, qui — après de premières défections dès cette époque (Degas, Cézanne) — se dissout progressivement à partir du milieu des années 1880.
La décennie 1890 est celle de l’expansion du mouvement hors de France.
Le mouvement impressionniste
Le mouvement impressionniste est lié à des inventions techniques : la photographie (procédé Niepce, 1826), que les impressionnistes considèrent comme un moyen extraordinaire d’investigation du monde, et le conditionnement en tubes du pigment à l’huile industriellement préparé, qui permet d’aller « peindre sur le motif» au lieu de se contenter d’ébaucher un sujet destiné à être exécuté dans l’atelier.
Il procède aussi d’une curiosité scientifique bien dans le goût d’un XIXe siècle épris de progrès : lecteurs du chimiste Chevreul, dont le traité De la loi du contraste simultané des couleurs, publié en 1839, propose une codification des lois de la couleur, les peintres impressionnistes et surtout les néo-impressionnistes Seurat et Signac pratiquent sur la toile une rigoureuse division des couleurs, dont le mélange doit être établi par l’œil du spectateur («mélange optique»).
Enfin, l’impressionnisme, suivant en cela la peinture contemporaine réaliste qui a influencé sa gestation, est l’enfant des mœurs de son temps.
Prisonniers d’un monde urbain de plus en plus tentaculaire, les peintres de ce courant peignent soit la ville qui les entoure, soit les lieux de distraction qu’un nouveau moyen de communication, le chemin de fer, permet d’atteindre : les berges des rivières dans la banlieue parisienne, ou bien la mer proche de la capitale, c’est-à-dire la côte normande qui est la première atteinte par le train.
Si l’impressionnisme est le fait de peintres français pour l’essentiel, sa genèse ne peut se comprendre sans les voyages que les artistes de ce mouvement ont effectués à l’étranger et sans les influences qui se sont alors exercées sur eux. C’est un historique d’influences qui est aussi une source d’impression pour mon métier d’artiste peintre.
En 1870, pendant la guerre franco-prussienne, Monet et Pissarro trouvent en Grande-Bretagne un refuge et découvrent Constable et ses études de ciel, Turner et ses paysages de lumière ; l’année suivante, Monet se rend aux Pays-Bas, dont la lumière est pour lui une révélation et la source d’une première série de toiles, les Moulins.
Déjà passionnés par les recherches du Français Eugène Boudin et du Néerlandais Johan Barthold Jongkind sur le paysage, les deux artistes se tournent décidément vers la peinture de plein air.
Les artistes peintres impressionnistes
La France est le berceau et la terre d’expansion privilégiée de l’impressionnisme. Si les peintres impressionnistes admirent les tableaux réalistes, ils apprécient encore plus l’œuvre d’Édouard Manet.
Un temps, Manet se rapproche du groupe, peignant comme Monet des compositions en plein air au bord de la Seine, 1874, Munich, Neue Pinakothek).
Mais c’est véritablement autour de Monet et de Camille Pissarro que le groupe se constitue. Les deux artistes, ainsi que Pierre Auguste Renoir, peignent en plein air entre 1867 et 1869, tentant de reproduire les effets de la lumière sur l’eau en Normandie ou sur les berges de la Seine et de l’Oise. Alfred Sisley, d’origine britannique, Frédéric Bazille, Berthe Morisot, Mary Cassatt, de nationalité américaine, Armand Guillemin appartiennent à cette première génération de l’impressionnisme et resteront fidèles à ses principes tout au long de leur carrière.
Edgar Degas rencontre plus brièvement l’impressionnisme, ainsi que Paul Cézanne qui s’en sépare rapidement pour construire une œuvre soulignant la solidité des formes. Le Néerlandais Vincent Van Gogh construit à partir de l’impressionnisme une esthétique entièrement singulière.
En Allemagne, Max Liebermann et Lovis Corinth sont les représentants d’une esthétique en partie seulement influencée par l’impressionnisme français.
En Grande-Bretagne, Philip Wilson Steer, dans ses premières œuvres, peint sur le motif des paysages dans la tradition de Monet.
L’Amérique adhère à l’impressionnisme par l’intermédiaire du groupe des Dix, ou Ten American Painters, fondé en 1898, et dont les principaux représentants sont John Twacht-man et Childe Hassam, qui ont séjourné en France et exposent leurs paysages de Normandie chez Durand-Ruel et à New York.
En Pologne, le mouvement appelé « kapisme » ou « colorisme polonais », avec en particulier le peintre Jan Cybis, instaure un impressionnisme tardif, dans le courant des années 1920.
La technique et le support dans l’Impressionnisme
Les tableaux impressionnistes sont des huiles sur toile, généralement de petit format car les toiles sont achetées déjà montées chez le marchand de couleurs et choisies d’une taille telle qu’on puisse les transporter d’abord sur le motif.
Désireux de dessiner dans la couleur, les impressionnistes pratiquent volontiers le pastel comme Renoir ou de Degas.
Les thèmes impressionnistes
La peinture impressionniste repose sur le désir de rendre l’impression fugitive que produit un motif exposé à une lumière variable. Le sujet n’est pas ce qui importe : les impressionnistes réalisent de la peinture de paysage non pour le caractère pittoresque du lieu qui est généralement quelconque, mais pour les effets d’atmosphère. Pour rendre compte de l’aspect extrêmement différent que peut prendre un motif suivant les conditions de la lumière et donc les heures du jour, les impressionnistes procèdent quelquefois par séries : ainsi Monet avec les Cathédrales et les Meules.
Ils recherchent volontiers les conditions extrêmes, ne dédaignent pas que le motif soit brouillé par les conditions d’éclairage : d’où les nombreux paysages de neige, d’inondation et, en général, l’importance de l’eau ou plus exactement des reflets de la lumière sur la surface mouvante de celle-ci, dans leurs œuvres.
Très influencés à leurs débuts par la peinture réaliste et notamment par Courbet et par Manet, les impressionnistes se montrent sensibles aux sujets de la vie quotidienne contemporaine. La ville et en particulier Paris, mais d’autres villes ont aussi eu leurs peintres impressionnistes comme Annonay, alors en pleine transformation, les occupe singulièrement : les grands boulevards, le quartier neuf de la gare Saint-Lazare avec le pont de l’Europe, les immeubles et les intérieurs haussmanniens font partie de l’iconographie de Manet, de Monet, de Renoir, de Caillebotte, autant plus que les paysages de campagne ou de mer.
L’intérêt pour les loisirs des citadins, flâneries dans les parcs urbains (la Musique aux Tuileries de Manet, Londres, National Gallery), conversations aux terrasses des cafés, baignades, parties de canotage et bals populaires dans les environs de la capitale (à Argenteuil, à Bougival, à Chatou) forment le sujet de tableaux colorés.
Toulouse-Lautrec montre sans fard les formes les plus dégradées des réjouissances sociales (les maisons closes, les cabarets, l’alcool), tandis que les plaisirs plus convenus (le théâtre, l’opéra, les courses) retiennent Degas. Passionnés par la lumière, les peintres impressionnistes s’intéressent aux nouvelles formes d’éclairage: la lumière artificielle produite par les lampes à gaz est l’étude essentielle du Bar aux Folies-Bergère de Manet (Londres, Courtauld Institute).
Si Manet est un grand portraitiste (Portrait d’Émile Zola), et un grand peintre de natures mortes, de même que, plus tard, Van Gogh et surtout Cézanne, à l’apogée du mouvement entre 1874 et 1880, ces deux genres ne retiennent guère l’attention des artistes impressionnistes, qui pratiquent encore moins la peinture d’histoire.