Qui est Degas ?
Peintre, pastelliste et sculpteur singulier, Edgar Degas, aristocrate réactionnaire, cultivé et caustique, intransigeant et orgueilleux, décrit la vie parisienne quotidienne, mondaine et laborieuse. Il met en scène le mouvement dans des cadrages audacieux et variés. La ligne inspiré de Ingres s’harmonise dans son œuvre avec la couleur, d’abord discrète puis éclatante, finement posée ou largement brossée, hachurée au pastel, qui devient froide sous des éclairages artificiels.
Honnis la peinture de portrait et quelques paysages, Degas peint la vie publique quotidienne et parisienne : courses de chevaux, spectacles de danse, musiciens à l’Opéra et au théâtre, scènes de café, femmes laborieuses, mais surtout, il s’intéresse à l’univers intime de la femme, danseuses en coulisses ou femmes à leur toilette.
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Ses compositions, de technique complexe, sont réalisées sur toile de tout format, sur papier, sur carton ou monotype de petit ou moyen format.
Ses œuvres entrent de son vivant dans les collections du Louvre et sont achetées par de nombreux collectionneurs privés.
Paris et surtout Montmartre comptent plus que ses voyages en Italie, en Espagne, à La Nouvelle-Orléans, et en province (Trouville, Boulogne, le Midi).
Degas copie Dürer, Holbein, Poussin, Rembrandt. Il admire les maîtres florentins et vénitiens, Ingres et Delacroix. Il apprécie le naturalisme et la vie urbaine décrite par Zola et peinte par Manet. Des maîtres de l’estampe japonaise, Utamaro et Hokusai, il retient la liberté d’expression, l’intrusion dans l’intimité et surtout le cadrage décentré ainsi que la silhouette vue de dos. Il apprécie les photographies de É. J. Marey et d’E. Muybridge.
À ses débuts, auprès du peintre Lamothe, Edgar Degas acquiert l’amour du dessin qui lui permet de saisir l’idée, l’immédiateté et le mouvement. Sa formation ingresque se lit dans la forte présence des personnages, la prépondérance de la ligne et le raffinement de la couleur, dans son goût pour la simplicité des compositions et des teintes à dominantes noires et brunes, rehaussées de taches vivement colorées (la Famille Bellelli).
Dans ses sujets d’histoire il cherche «l’esprit de Mantegna avec la verve et la coloration de Véronèse », dit-il, et admire la couleur dans l’œuvre de Delacroix. Sa modernité picturale s’exprime dans la finesse de ses accords posés en frottis ; il mêle à la peinture à l’huile de l’essence afin d’obtenir un ton doux et mat, transparent ou opaque.
Après 1868, Degas affirme son goût pour le naturalisme, la «modernité baudelairienne» et les sujets insolites, sans sentimentalité ni préoccupation d’ordre social. Il s’attache à la composition, au jeu des formes et du mouvement humain. Ses mises en pages japonisantes sont amplifiées par les regards ascendants ou plongeants de ses personnages, les oppositions heurtées, les contre-jours. Certaines se rapprochent, dans le découpage de l’espace, de la cadrage subtil, souvent décentré, qui augmente l’impression de mouvement ou de déséquilibre (l’Orchestre de l’Opéra).
Degas se montre réfractaire à la technique impressionniste. Il préfère la représentation du mouvement à la perception lumineuse, la notation fugitive d’une attitude, analysée, décomposée, recomposée, parfois à l’aide de la photographie. Il inonde ses scènes d’une lumière froide, artificielle, qui accentue les formes. Le pastel, pigment sec, opaque et riche en matière, rapide d’exécution, est très approprié à son trait.
Dans la décennie 1870, Degas privilégie l’art du pastel sur monotype, pour traduire l’éphémère, le fugace, que je reprend dans la série, sensation photographique. Il superpose les couches et les hachures hardies de pastel, de teintes tantôt vives tantôt nuancées, juxtaposées à un noir intense. Ce pigment lui permet aisément de reprendre son ouvrage: «Aucun art n’est aussi peu spontané que le mien. »
« Degas dépouille ses sujets du pittoresque et de l’anecdotique. Ses danseuses développant sur scène des arabesques aériennes dans des équilibres inouïs sont représentées en coulisses, épuisées, usées, le corps relâché, presque gauche. Il peint sans plus de concession la femme à sa toilette. Les teintes deviennent éclatantes et les toiles monochromes sont animées de touches de couleur pure. Les hachures du pastel rendent la chair parfois bleue, verte, violette, rose et orangée, tracent un corps flou sous un éclairage froid.
Ses paysages au pastel (1890-1893), plantés comme un décor, abolissent la forme et suggèrent l’atmosphère, dans une composition sobre et hachurée fiévreusement
Au tournant du siècle, handicapé par sa vue déficiente, Degas simplifie la composition de ses pastels, modèle davantage les formes par des hachures de couleur, denses et rapides, accentue les ombres colorées (Danseuses). Ce réaliste, illusionniste du cadrage, n’est pas académique au sens strict, pas plus qu’il n’est naturaliste ou impressionniste.
De son vivant, Edgar Degas est exposé au Salon du Louvre et participe aux expositions impressionnistes; sa singularité est reconnue par ses contemporains, mais sa célébrité est restreinte.
Défenseur du réalisme, Degas offre une vision du monde moderne par sa thématique et sa plastique. Il se situe «entre Ingres et Delacroix, et par-delà Cézanne».
Degas peint des sujets nouveaux : le Pédicure (1873, Paris, Orsay), les prostituées, les courses, l’envers du monde du spectacle. Il saisit des attitudes et des gestes insolites et inédits, capte le mouvement, montre une réalité sans fard, sans pathos.
Passionné de technique, il recherche les effets de la fresque italienne, la perfection de l’art des maîtres hollandais, le glacis vénitien. Il adapte la technique à son génie propre; il mélange la peinture à l’huile à la détrempe, à l’essence. Il rénove la technique du pastel, utilise le premier le pastel sur monotype, et surtout associe le pastel à la gouache délayée en lavis. Il innove en combinant le crayon coloré et le pinceau, invente l’humidification du pastel par de la vapeur d’eau bouillante et la superposition de couches de pastel fixées. Degas peint à l’huile sur des toiles non apprêtées.
Le peintre invente de nouveaux cadrages, en plans coupés, en plongée, en contre-plongée. Il relève la ligne d’horizon, renverse la perspective, multiplie le gros plan et les raccourcis elliptiques… Il crée des oppositions, des contre-jours, une lumière artificielle qui suggère un nouvel espace et projette des taches de couleur inattendues.
Degas est le dernier artiste à travailler avec ferveur en atelier: « L’ennui me gagne vite à contempler la nature. »