L’art cinétique est une notion des plus vagues, qui prend en charge des pratiques très diverses et éventuellement contradictoires dans leurs implications : en effet, dans son sens premier, l’Art cinétique s’attache à la notion de mouvement ; ce mouvement peut être réel (machines animées) ou virtuel (objets en donnant l’illusion) ; mais ce premier partage n’est pas nécessairement opérant, les travaux statiques d’Agam et les travaux animés de Pol Bury restant dans la ligne de l’Op Art.
Tableau contemporain Art cinétique & Op art
Op Art & art cinétique
En revanche, et en toute rigueur, rien n’autorise à rapprocher Tinguely, dont les sculptures à base de déchets animés exposent tout à la fois la dimension poétique des assemblages et la vanité comique du machinisme, et Nicolas Schöffer, qui conçoit, en s’appuyant sur la science et la technologie, des objets ou des environnements « sensoriels » — qui exaltent précisément la modernité.
Toute une part de l’Art cinétique provient de l’Abstraction géométrique : la peinture géométrique et, de manière générale, la « pensée mathématique » permettraient d’échapper au ressassement expressionniste, individuel et sentimental. Certains des participants à l’exposition historique « le Mouvement », à la galerie Denise René en 1955, se situaient dans cette voie : Vasarely (1908), Agam (1928), Soto (1923), que devaient rejoindre Le Parc, Yvaral, Cruz-Diez.
Tous ces artistes recherchaient, à travers une grande économie de signaux et une dépersonnalisation de la fabrique au profit des mathématiques, une organisation polysémique de la surface picturale en deux dimensions induisant plusieurs possibilités de perception s’excluant mutuellement. Tandis que Vasarely, Agam, Yvaral poursuivaient dans cette voie (connue sous le nom d’Op Art, pour Optical Art), un groupe se constitua autour de François Morellet , en 1963 : le G.R.A.V. (Groupe de recherche d’art visuel), avec Le Parc et les Molnar, entre autres, dont l’activité inventive (oeuvres collectives, environnements, usage du néon, constitution de programmes aléatoires, intervention nécessaire du spectateur) et souvent ironique abandonne rapidement la pure exploration des hypothèses perceptives pour entreprendre un retour critique sur les conditions de l’activité artistique et sur ses catégories, frôlant par là les marges des grands mouvements des années 70, Art minimal et Art conceptuel. Ces mouvements ont eu une grande influence sur ma façon de penser l’art et en tant qu’artiste peintre contemporain toujours présent lors de mes créations actuelles. Vous pouvez retrouver cette inspiration de la vanité actuelle avec intelligence artificielle dans la série IAA.
Parmi ceux qui firent l’expérience du mouvement réel, la référence à Calder (d’ailleurs présent chez Denise René en 1955), à ses Mobiles et Stabiles, fut souvent revendiquée : Pol Bury étudie le mouvement lent, éventuellement sur des plans verticaux apparentés au tableau, comme dans 4087 cylindres érectiles (1971-1972), où les minuscules cylindres sont mus par un moteur électrique. Nicolas Schôffer exploite tous les ressorts de la technologie de pointe, d’une manière qui constitue un hymne à la modernité ; ses grands projets monumentaux ont été peu réalisés.